Il est venu 3 imbéciles qui ne le savaient pas et qui l’ont fait.
Recit incroyable sur les possibilités infinies de la rencontre.
Allez voir sur le blog http://descentedesameriques.over-blog.com pour avoir un apercu grandeur nature avec quelques photos parlantes.
Samedi 9 décembre 2006, 9h30 du matin. On commence a faire du stop aux abords de l’interstate 40 a Conway, une petite ville d’Arkansas. Notre objectif de la journée est assez modeste : parcourir les 30 miles (50 km) qui nous sépare de Little Rock la capitale de l’Etat d’Arkansas.
Souriant et confiant apres plusieurs expériences de stop positives dans les montagnes pour aller et revenir a notre randonnée, on apprécie le soleil qui brille déja haut dans un ciel bleu et limpide.
Au bout d’a peine 15 minutes d’attente, un homme seul dépassant de peu les 40 ans, nous fait signe de monter a travers sa vitre avant de s’arreter quelques metres plus loin.
Savourant notre chance, nous courrons d’un trait vers la voiture, chargeons nos sacs dans le coffre, et nous voila partis pour Little Rock.
Tres vite, une conversation amicale raisonne dans la voiture. Nous faisons connaissance avec notre hote, Greg qui habite maintenant dans la campagne pres de Conway apres avoir vecu 20 ans a Little Rock. Pour notre part nous nous livrons une fois de plus a un exercice assez pointilleux, résumer en deux trois mots le pourquoi du comment de notre voyage.
Pour simplifier nous lui disons que nous revenons d’une marche a la fois envoutante et exténuante dans les Ozark Mountains et qu’a présent nous souhaitons nous diriger vers Memphis (a 200 km de Little Rock) pour chercher un bateau pour descendre le Mississippi.
Aussitot il nous demande :
- « Mais vous savez ou vous allez loger a Memphis ? »
- « Euh non pas vraiment... normalement on dort chez des amis ou on utilise des sites internet comme le couch surfing mais on n’a trouvé personne a Memphis. »
- « Ah, reprend-t-il, car mon fils était étudiant a Memphis et je suis sur qu’il peut trouver un ami pour vous héberger. »
- « Attendez, je vais l’appeler. » Cinq minutes apres avoir pénetré dans l’univers de Greg, le voici déja en train d’appeller son fils pour nous trouver un logement !
Sur le moment son fils ne repond pas. La conversation se poursuit.
- « Ou voulez-vous que je vous dépose a Little Rock ? » demande Greg
- « C’est comme vous voulez, ce qui est le plus simple pour vous. Nous on doit juste aller sur internet a la bilbiotheque municipale et faire une lessive car apres 6 jours de marche avec un feu de bois comme meilleur compagnon, nos habits puent terriblement ! »
- « Ah ok. Je connais un endroit ou vous pouvez faire votre lessive pas chere. C’est dans le quartier ou j’habitais avant. Si vous voulez, je vous dépose au lavomatique et pendant que vous faites votre lessive moi je fais mes courses de Noel et apres je vous retrouve et je vous amene a la bilbiotheque. »
- « Euh... oui merci. Mais faut pas vous déranger pour nous. »
- « Oh vous savez j’ai vraiment rien a faire a part des achats de Noel. Ce sera beaucoup plus intéressant de prendre ma journée pour vous aider. »
Arrivée au lavomatique on se rend compte qu’on n’a pas de monnaie. Pas la peine de le dire deux fois, Greg va tout de suite a sa banque située a deux pas de la et échange un billets de dix dollars contre des « quarters » (des pieces de 25 cents), qu’il nous donne en totalité.
Encore sous le choc d’une telle bienveillance, nous faisons tranquillement notre lessive tout en chantant les louanges de ce Greg sorti de nulle part devenu pour l’espace d’une journée notre chevalier servant.
Quand il revient, notre linge étant encore dans le sechoir, nous reprenons notre conversation sur nos études, notre voyage, sur la beauté de la France,... et l’endroit ou nous allons loger ce soir.
Tout d’un coup Greg nous dit :
- « Ecoutez, je ne veux pas que vous restiez ici sans savoir ou vous allez dormir ce soir. J’ai appellé mon fils et il ne sait pas ou vous loger alors je me suis dit que si vous vouliez, vous pourriez peut etre venir loger chez moi a Conway et demain matin tot, je vous ramene a Little Rock pour que vous puissiez faire du stop tranquilement vers Memphis... »
Notre premiere réaction est silencieuse. On ne sait plus que penser, que dire. On se regarde tous les trois en souriant. En l’espace d’une ou deux minutes on fait un mini-conciliabule en francais. Mais la réponse s’impose tout de suite a nous. Puisque on n’a rien de special a faire, qu’on a pas de programme pré-établi et que notre voyage est base sur la rencontre, allons dormir chez ce gars.
Notre reponse ne se fait pas attendre :
- « D’accord, allons dormir chez vous, c’est vraiment trop sympa de votre part. Mais alors si on vient chez vous, on vous cuisine un repas francais ! »
- « Parfais. Allons a la bibliotheque, puis quand vous aurez finit avec internet on pourra retourner a Conway. »
En arrivant a la bibliotheque, Greg nous dit :
- « Pendant que vous serez dans la biliotheque moi je vais encore faire deux trois courses. Est-ce que vous voulez reprendre vos sacs ou les laisser dans le coffre ? »
- « On peut les laisser dans le coffre, pas de probleme. »
- « Vous me faites confiance a ce point la ? » repond-t-il de maniere a la fois surprise et heureuse.
A nouveau on se regarde tous les trois. L’idée qu’il puisse partir sans revenir avec nos sacs ne nous avait meme pas traversé l’esprit. Pour nous c’etait evident : il nous fait confiance et en retour naturellement on lui fait confiance. Et c’est ce qu’on lui dit :
- « C’est une histoire de confiance mutuelle. Vous, vous n’avez pas peur que nous soyons des terroristes et qu’il y ai des bombes dans nos sacs ? »
La il nous livre une réplique memorable :
- « Non je ne crois pas que les terroristes font leur lessive, en tout cas ce ne doit pas etre leur priorité comme c’était le cas pour vous. »
Il nous laisse a la bibliotheque ou on profite de l’internet gratuit pour vous donner des nouvelles de notre marche dans les Ozark Mountains.
Deux heures apres on se retrouve pour aller chez lui. La il nous dit :
- « Vous savez, pres de Little Rock il y a une petite montagne tres jolie, qu’on peut grimper en moins d’une heure. Vu que vous aimez bien marcher je pense que cela vaut le coup d’y aller. En plus a cet heure la on a des chances de voir le soleil couchant sur la ville, les montagnes et le fleuve. »
Ok, nous on est ouvert a tout alors immediatement on embarque.
Pour faire court on va arreter la. En resume, cela donne une balade splendide avec un point de vue a 360 degres, un tres bon repas : flammenkuche, salade verte aux noix, tarte aux pommes et a la cannelle, vin rouge,..., une soirée a discuter et a rire avec Greg et sa femme Peggy, une nuit tres reposante dans de bons lits – d’autant plus apréciable apres une semaine de camping – un petit dej cuisine par Greg a base de viande de biche qu’il avait chasse lui-meme, un retour en voiture avec Greg a Little Rock et des adieux quasi-dechirants avec notre ami de toujours.
Sans faire de stop on n’aurait jamais eu la chance de rencontrer la gentillesse de Greg. C’est genial de pouvoir se laisser ainsi bousculer par l’inconnu. Finalement tout notre voyage est entierement tourné vers cela, apprendre a accueillir l’inattendu. Rien n’est sur. Rien n’est jamais completement defini a l’avance. Chaque rencontre est suceptible de changer notre itineraire, nos « projets », nos vies et c’est ca qui est genial.
- préparer un coin feu - a l’abri du vent - en ovale pouvant accueillir 2 feux : 1 pour cuisiner et 1 pour se réchauffer
- aller chercher de l’eau pour cuisiner
New York City - la Tour de Babel
Après 15 jours de folies à New York, ca n’a pas été facile de prendre le chemin du départ. On en sort plein d’images, d’impressions de sentiments,… On a donc décidé de vous faire part en vrac de certaines de ces impressions.
Bonne lecture.
Multi-culturalité
Ce qui était marrant à New York c’est que lorsque l’on parlait francais entre nous dans la rue ou dans le métro, cela nous paraissait tout à fait normal. En effet, à New York, tout le monde se parle dans sa propre langue. On ne parle anglais que pour se parler entre “communautées”. New York, c’est Babel.
Chaque quartier est un pays, et pour nous qui aimons marcher, c’est un véritable tour du monde que nous avons fait pendant nos 15 jours là-bas.
Dans le premier quartier de Brooklyn ou on habitait, tout le monde parlait espagnol – il y plus de 2 millions de latinos americains à NY. Dans le supermarché on disait « Hola » en entrant et « Muchas Gracias » à la caisse.
A deux pas de là, un quartier juif. Tout est écrit en hebreux.
A trois pas, un quartier de noirs americains. Pas un blanc à l’horizon.
Little Italy. China Town. Des mondes à part entiere.
Après on a habité dans un quartier Russe. Dans le supermarché, tout est écrit en Cyrillic, des Babouchka font leurs courses, et le caissier ne parle que le russe.
Que de mondes dans ce monde.
Que de mondes dans cette ville.
New York est vraiment une ville incroyable. En 15 jours, nous n’avons fait que toucher du doigt toute cette diversité culturelle, mais déjà elle nous impressionne.
PS : On part marcher 15 jours a partir du 1er decembre dans l’Arkansas, through the Ozarks mountains donc on n’aura pas accès à internet. Pour plus d’info sur la ballade allez voir le site http://www.fs.fed.us/oonf/ozark
BABEL – Le film
Pendant notre sejour New Yorkais nous avons été voir le dernier film d’Alejandro Gonzales Inarritu (Amours Chiennes, 21 Grammes), intitulé BABEL. Etrange clin d’oeil du destin qui nous fait aller voir - un peu par hasard - ce film dont le nom pourrait carractiser à merveille la ville dans laquelle nous étions.
Ce film - beau et dur - nous a inspiré quelques commentaires.
Comme il est impossible d’en faire le resumé, voila un des resumés “officiels”:
“ En plein désert marocain, un coup de feu retentit soudain. Il va déclencher toute une série d'événements qui impliqueront un couple de touristes américains au bord du naufrage, deux jeunes Marocains auteurs d'un crime accidentel, une nourrice qui voyage illégalement avec deux enfants américains, et une adolescente japonaise rebelle dont le père est recherché par la police à Tokyo. Séparés par leurs cultures et leurs modes de vie, chacun de ces quatre groupes de personnes va cependant connaître une même destinée d'isolement et de douleur...
En quelques jours, tous vont faire l'expérience d'un profond sentiment de solitude - perdus dans le désert, dans le monde, et étrangers à eux-mêmes. Tandis qu'ils expérimentent les pires moments de peur et de confusion, ils découvrent aussi la valeur de l'amour et du lien qui unit les hommes…”
Pendant 2h30, le film nous fait valser entre les Etats-Unis, le Mexique, le Maroc et le Japon, entre l’anglais, l’espagnol, le marocain, le japonais et le langage des signes.
A la fin du film, personne n’ose sortir de la salle. Pas un bruit, pas un mot, pas un mouvement.
Quand on sort finalement du film, on se dit “ comme par hasard, pour ceux qui sont blancs et americains, cela finit toujours bien ! ” pas pour les marocains, pas pour les mexicains…
Pourquoi ?
Parce que le realisateur est un americain qui veut faire plaisir à ses conpatriotes ?… Non puisque le realisateur, Inarritu, est mexicain.
Alors pourquoi ?
Peut être parce qu’Inarritu voulait décrire la realité et non pas un conte de fée.
Le monde n’est évidemment pas facile pour tous et Inarritu nous le rapelle de maniere saisissante et tragique.
Je ne suis pas sur que je voulais voir ce genre de film la ce soir… mais je l’ai vu. Je suis sûr que je ne veux pas vivre dans le monde tel qu’il est decrit par le film… mais pourtant j’y vis.
La realité n’est pas toujours telle qu’on voudrait qu’elle soit.
La realité est que le monde est petri de beauté - on en rencontre sans cesse dans notre voyage - mais que la beauté ne suffit pas à effacer l’injustice. On vit dans un monde ou le pire cotoie le meilleur. On est des etres humains au sein desquels cohabitent le pire et le meilleur.
Parfois on oublie cette realité, ou disons plutot, parfois on voudrait oublier cette realité. Il y a tellement de belles choses dans ce monde, tout est si facile pour nous, que parfois on en oublierait que tout le monde n’y a pas accès et que ce n’est pas le cas pour tout le monde.
Bon, se rappeler que le monde est dur n’est pas une finalité en soi. Il ne s’agit evidemment pas juste de pleurer toute la journée en pensant au triste sort du monde… Ce film nous fait plutôt reprendre conscience de la chance que nous avons et que lorsque nous vivons quelque chose de rare il faut essayer de le partager avec ceux qui nous entourent pour que cela puisse s’étendre...
Connaitre, re-connaitre et essayer de comprendre l’injustice n’est que le premier pas d’un processus de conscientisation, puis d’actions plus éclairées, plus lucides.
Ce film est aussi finalement une reflexion sur les relations à un niveau individuel entre êtres humains et sur la difficulté de ces relations. Finalement, c’est un film sur l’incomprehension. Sur la difficulté de se comprendre, entre peuples si differents, mais aussi entre parents et enfants, et tout simplement entre êtres humains.